الأربعاء، 25 أبريل 2012

les petits secrets de sa vie



Farouk Ibrahim a été le photographe particulier du Rossignol brun Abdelhalim Hafez. Il raconte dans ce témoignage la relation privilégiée qui les a liés. Car il faut rappeler qu’au-delà de son devoir d’immortaliser les moments forts de la vie du grand chanteur égyptien, Farouk a été le compagnon de toute une vie, le confident et l’ami de 28 ans de la carrière du chanteur de Kariatou el fenjel. Le hasard A propos de ses premiers contacts avec l’artiste, Farouk Ibrahim se souvient et remonte le cours du temps‑: «Nous nous sommes rencontrés sur un même objectif que chacun cherchait à sa façon : le vedettariat, lui, il le cherchait dans l’empire de la chanson et du cinéma. Moi, je le cherchais dans le journalisme. Cela se passait au jardin Al Andalous, en 1953, à l’occasion des festivités marquant le premier anniversaire de la Révolution. Chokri Ragueh était directeur de l’opéra et dirigeait le gala retransmis en direct à la radio. J’étais chargé de prendre en photos le grand événement. Le chanteur-vedette de la soirée a mis du temps à arriver. Alors, Abdelhalim a proposé à Youssef Bek Wahby de monter en scène pour rendre l’attente moins pénible. Wahby lui demanda : - Où est-ce que tu voudrais monter ? Tu sais chanter toi ? Halim lui répondit que oui, Wahby lui demanda s’il avait une troupe avec lui. Le jeune chanteur quasiment inconnu, se retournant montrait huit bonhommes parmi lesquels le musicien Mohamed El Mougui qui portait un luth. Le public était encore pris par les boissons et les sandwichs qu’il prenait. Il accordait un vague intérêt à cette troupe montée sur scène. Puis forcément, on n’avait plus rien à faire d’autre que d’écouter cet artiste ambitieux qui avait investi la scène. J’ai entendu Mohamed Abdelwaheb commenter sur le coup: «Ce gars est une bête de scène». Halim a chanté Safini marra. Le public l’a applaudi avec conviction. Halim faisait ses premiers pas. Il perçait de façon vertigineuse. Nous deux avions besoin de réussir dans notre profession pour pouvoir gagner notre pain. Chaque fois que je le rencontrais dans une manifestation, je le saluais vivement. L’écrivain Moufid Faouzi vint consolider ma relation avec Abdelhalim avec un sens de l’anticipation remarquable. Il a su voir dans Halim un projet de grand chanteur. Ce qui m’attacha le plus à cet artiste fin, ce fut son opiniâtreté et sa persévérance au travail. Il a appris la musique sur des bases solides. Il a commencé à jouer sur le hautbois à la radio. Mais je ne le connaissais pas suffisamment en ce temps-là. J’ai commencé à compter réellement dans sa vie après le film Ayamna el hilwa (nos jours heureux) où il accompagna Omar Sharif, Ahmed Ramzi et Faten Hamama. Il commençait alors à se faire connaître au cinéma et avait la chance de figurer à côté de superbes vedettes du grand écran : Faten‑Hamama, Chadia… Je considère Lahn el wafa (son premier film) comme un grand tournant dans la carrière de Abdelhalim. Chadia lui donna une chance inouïe. Elle était une artiste célèbre et il n’était pas évident qu’une star de sa dimension accepte de chanter en duo avec un artiste inconnu et qui se frayait un chemin dans l’univers de la chanson et du cinéma. Notre relation s’est développée depuis. On ne supportait plus de se séparer. Le Rossignol brun voulut même que je devienne son photographe particulier. «Il a beaucoup appris au contact de Abdelwaheb» «L’appareil-photo était un troisième ami qui nous rassemblait couramment. Halim m’a donné toute la liberté pour le prendre en photo quand je veux et comme je veux. Il me présentait à ses amis et collègues et me tira du besoin. Il a su être un précurseur, gagnant une dizaine ou une quinzaine d’années sur son époque. Il m’a propulsé en haut de la pyramide des photographes professionnels comme il a su le faire pour tous ceux qui le fréquentaient : paroliers, compositeurs, musiciens, journalistes… Ils sont nombreux ceux qui doivent leur réussite au chanteur de «Qariatou el fenjel». Farouk Ibrahim raconte : «Tous ces gens-là avaient pratiquement le même âge que lui. Une même génération nous unissait : Issam Bassila, Maher El Attar, Wajdi El Hakim, Kamel El Bitar… sans parler des musiciens compositeurs et paroliers. Nous étions tout heureux d’accéder aux hautes sphères de la société grâce à ce jeune artiste. Partout où il passait, je devais l’accompagner même pour des répétitions. J’étais heureux pour ce statut car les gens m’appréciaient parce que j’étais en quelque sorte une partie de l’artiste. Et il plaisait aux gens de sentir l’odeur de cette partie de l’idole des mélomanes. Par la suite, Halim a pris l’habitude de me prendre avec lui hors d’Egypte». Farouk Ibrahim tente par la suite d’analyser le secret du rayonnement de ce petit bonhomme : «Il était d’une rare intelligence. Et cet atout lui permit d’apprendre énormément au contact de Mohamed Abdelwaheb. Par exemple, le fait d’être précis, méticuleux, perfectionniste. Il fit sienne la théorie du musicien des générations qui disait qu’autant vous donnez aux arts, autant ceux-ci vous le rendent bien. Le chant et la musique ne pouvaient être considérés comme un simple acte commercial. Halim s’acharnait à produire un art sublime et sincère qui va droit au cœur. Et c’est pourquoi plus de trente ans après sa disparition, le Rossignol brun est toujours présent dans le cœur des mélomanes. Je dois vous révéler que Abdelhalim Hafez tenait un carnet de numéros téléphoniques où les domestiques enregistraient les noms des gens qui ont contacté le grand chanteur durant toute la journée. Supposons que d’habitude, ce sont 200 personnes qui le demandent chaque jour au téléphone, s’il arrive qu’un jour, ils ne soient plus que 160, eh bien, à son réveil, c’est lui qui téléphone à la quarantaine de personnes qui manquent. Je lui ai demandé un jour le secret de son obstination à entrer en contact avec les gens qui n’auraient pas ce jour-là demandé de ses nouvelles, sa réponse m’a proprement laissé ébahi. Il me répliqua: ‘‘En fait, il m’a fallu des années et des années de travail et de sacrifices pour avoir ces 200 personnes qui m’entourent de leur sollicitude et de leur affection afin qu’ils soient toujours là, fortement présents dans ma vie. Ils jouent au fond un rôle vital’’». Tahar MELLIGI

Abdel Halim Hafez, le rossignol brun L’égyptien Abdel Halim Hafez, le « rossignol brun » reste encore aujourd’hui, près de 30 ans près sa mort, l’une des figures les plus mythiques et des plus vénérées de la chanson orientale. Du Maroc à l’Arabie Saoudite, les radios continuent de diffuser régulièrement des chansons. Un film, présenté au dernier festival de Cannes vient encore de lui être consacré (il y en a eu d’autres auparavant). La vie d’Abdel Halim est un véritable roman, fait de gloire et de tragédie, dont il est parfois difficile de démêler mythe et réalité. Sa maman décède peu après lui avoir donné naissance (en 1929), et son père meurt à son tour 5 ans après. Recueilli par un oncle, l’enfant révèle très tôt de belles prédispositions pour le chant et son prof de musique, impressionné, suggère à sa famille de l’inscrire à l’institut musical du Caire. Il en ressortira avec un diplôme de prof de musique. Cependant, il est trop artiste pour mener une vie de fonctionnaire et préfère chanter dans les cabarets du Caire qu’enseigner la musique. Multipliant les absences, il se fait virer de l’éducation nationale. Remarqué dans un show à la radio par le grand compositeur et chanteur Mohamed Abdel Wahab (1907-1991) (qui fut dans les années 30 la première star du film musical arabe), il devient rapidement célèbre. M A Wahab lui confie en exclusivité ses nouvelles compositions et l’introduit dans le monde du cinéma.Son premier film, le charmant « Chant de la fidélité »1955, s’inspire en grande partiede la trajectoire du chanteur. C’est frais et le couple qu’il forme à l’écran avec la très mignonne Shadia a beaucoup de charme. Dans sa vie sentimentale, le pauvre Abdel Halim n’aura pas autant de chance qu’à l’écran. Amoureux fou d’une jeune fille de bonne famille, il s’oppose à l’autorité du père de celle-ci qui ne souhaite pas que sa fille épouse un saltimbanque. Le papa finira par céder, mais hélas, la jeune femme décède d’une tumeur au cerveau avant que le mariage puisse avoir lieu. On raconte que toute sa vie, Abdel dormira avec la photo de sa bien aimée sous son oreiller. Il est possible également qu’Abdel ait eu un coup de foudre pour Soad Hosni, l’actrice la plus populaire et la plus moderne du cinéma égyptien des années 60, surnommée « la Cendrillon du cinéma ». Certains même prétendent que les deux stars se seraient mariées en secret, et que cette union aurait duré 6 ans. Troublante coïncidence : plusieurs années après la mort d’Abdel, Soad se suicidera le jour de l’anniversaire de celui-ci. Cependant beaucoup nient l’existence de cette romance. Au cinéma, en tous les cas, on lui propose de jouer avec les plus jolies actrices du moment : Magda et ses magnifiques yeux en amande, la blonde Myriam Fakr El Dine, la douce ImaneJours et nuits (1956), avec cette dernière, compte parmi ses meilleurs films. Si l’intrigue a toujours un coté mélo (un jeune homme voulant protéger son frère, une vraie crapule, endosse à sa place le crime qu’il a commis), l’ambiance du film (avec une bande de jeunes qui circule à moto) a vraiment une fraîcheur qui tranche avec la production de l’époque. En outre, le jeune chanteur a un certain talent pour la comédie, et s’avère en tous les cas un bien meilleur acteur que le chanteur Farid el Atrache. Dans ce film et les suivants, il incarne un jeune héros timide et influençable, très doux complètement à l’opposé des très virils Farid Shawki et Roshdy Abaza, les acteurs les plus en vogue du moment. Dans Delilah (1956) un des premiers films en couleur du monde arabe, il retrouve Shadia :l’intrigue du jeune aspirant comédien amoureux d’une star alcoolique qui le rejette car elle le pense marié est digne de Nous Deux. Mais alors, les chansons sont tout simplement extraordinaires : Hafez fait frissonner en chantant une longue plainte face à une Shadia cramoisie et honteuse d’avoir refusé son amour. Quelle voix ! Illusions d’amour (1957) est un véritable plaidoyer pour le mariage arrangé. Abdel Halim n’arrive pas à effacer le souvenir de son premier amour (la belle Lubna Abdel Aziz) promise à un autre. Ses parents puis la vie lui feront comprendre qu’il faut taire ses passions et que sa première idylle n’était qu’une illusion. Si je ne partage pas du tout les messages insidieux de ce film, les chansons sont superbes.Les disques qu’a enregistré l’artiste permettent d’apprécier toute l’étendue de son talent La voix magnifique et bien timbrée est en outre très bien mise en valeur par des orchestrations qui prennent leur inspiration dans la musique occidentale ce qui rend ces morceaux très accessibles à une oreille non accoutumée à la musique orientale. En outre, l’émotion la plus vive s’en dégage : peines de cœur, tristesse infinie sont fort bien traduites par cet homme qui souffrait dans son corps et dans son cœur. En effet, il est atteint depuis l’âge de 11 ans d’une bilharziose qui va empoisonner son existence. A partir du milieu des années 50, il va ainsi alterner le tournage de films et les galas, avec des séjours dans des hôpitaux londoniens et de nombreuses interventions chirurgicales.Si bien que le très beau jeune homme au doux regard du « Chant de la fidélité » n’est déjà plus qu’un homme usé, au visage marqué dans son dernier film « Mon père sur l’arbre »1969.Ce dernier connaîtra un énorme succès populaire et demeure l’un des plus gros succès de l’histoire du cinéma égyptien. Le thème abordé par le film (un étudiant amoureux d’une jeune fille de bonne famille a hâte de connaître un amour un peu moins désincarné, et ne pouvant se résoudre à atteindre la fin de ses études et le mariage tombe dans les griffes d’une entraîneuse de cabaret. Son père venu à sa rescousse est lui-même victime d’une autre fille de joie) fera scandale parmi les intégristes musulmans. La liberté de ton du film, dans lequel on voit Abdel Halim partager le lit de la plantureuse Nadia Lotfi, les jeunes femmes en bikini et Abdel Halim lui-même chantant en slip de bain feront tousser quelques uns. C’était incroyablement moderne pour l’époque dans un film égyptien. L’atout principal du film repose sur les excellents numéros musicaux, (l’allègre numéro dansé et chanté par tous les étudiants, sur la plage sous des parasols bariolés, la magnifique chanson qu’Abdel Halim fredonne au soleil couchant vers la fin du film). En outre le DVD, apparemment épuisé, est de fort bonne qualité.Afin de compléter le portrait du « rossignol brun », on doit ajouter Abdel Halim Hafez, fervent défenseur du Président Nasser et de la cause arabe, n’a pas chanté que des romances mais aussi beaucoup d’airs patriotiques et pris position notamment pour la guerre d’Octobre en 1973 (offensive lancée par les troupes syriennes et égyptiennes pour reconquérir les territoires occupés par Israël depuis 1967). Donc, ce n’est plus seulement un chanteur, c’est aussi l’identité d’une nation, Ce qui explique peut être l’intense émotion ressentie lors de son décès (en 1977, à l’âge de 47 ans dans un hôpital londonien : plusieurs femmes se suicideront en apprenant la nouvelle, ses funérailles seront suivies par d’immenses foules) et maintenant (il reste le chanteur vendant le plus de cassettes dans les pays arabes, devant Oum Kalsoum).Plutôt que cette image patriotique, vecteur de tous les excès, je préfère garder d’Abdel Halim Hafez le souvenir de sa voix inoubliable et de la mélancolie infinie qui habitait ses chansons.Je n’ai pas vu le film qui lui a été dernièrement consacré. Il semble qu’il vaille surtout pour l’excellente interprétation d’Ahmed Zadki (mort d’un cancer avant la sortie du film).

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